Je ne lis pas la presse mais comme je suis encore en vacances et que mon beau-père la lit, je suis tombé sur la couverture du supplément du monde titrée Des idées pour changer la gauche.

Avant même de commencer l’article, j’ai éclaté de rire. La question n’a aucun sens. Comment changer quelque chose qui même différent serait toujours identique ? C’est un peu comme si on disait il faut changer le rouge. Il serait plus ou moins clair, plus où moins moiré, mais il resterait rouge.

Pour moi, les idées de gauche aujourd’hui sont des idées conservatrices. Or, en France, nous avons déjà un champion du conservatisme, Sarkozy. Alors à quoi bon d’un second conservatisme, moins efficace en plus, car moins ciblée sur la population vieillissante. Nous en avons même un troisième avec le Modem.

Changer la gauche serait changer ses idées fondatrices, tout au moins réviser totalement la manière d’atteindre les buts humanistes que la gauche s’est fixée au fil du XXe siècle. Cette révision ne peut plus s’appeler gauche. Si cette mouvance veut redevenir une force de progrès, elle doit faire pivoter la politique sur son axe… et en conséquence se dénommer autrement.

D’ailleurs, les fameuses idées neuves de la gauche ne sont pas spécialement des idées de gauche. Dans l’article du Monde, Philippe Aghion suggère la décentralisation pour facilité les expériences, donc maximiser les chances de trouvaille. C’est une position que je défends depuis Le peuple des connecteurs. Mais cette décentralisation a d’immenses conséquences.

C’est encore ma fameuse histoire de schizophrénie. On voudrait décentraliser d’un côté, mais garder le contrôle d’un autre… Comme Sarkozy veut libérer d’un côté et policer de l’autre.

Quand je relève ces incohérences, on me dit qu’il faut de tout pour faire un monde. On ne pourrait pas toujours agir de la même façon dans toutes les situations. Mais où placer le curseur ? Jusqu’où décentraliser, jusqu’où libéraliser ?

On croit à une méthode politique ou on n’y croit pas. On ne peut pas avoir les avantages et s’éviter les inconvénients. Décentraliser, ça implique libérer, ça implique pour le pouvoir de perdre du pouvoir. Mais à droite comme à gauche, les hommes de pouvoir ne veulent pas renoncer à leurs privilèges.

Ils ont tout d’abord la prétention de croire avoir la solution à tous les problèmes, à tel point qu’ils n’envisagent jamais que leurs objectifs soient accessibles sans le recours à un état interventionniste. Par ailleurs, ils veulent changer la société sans se changer eux-mêmes, sans revoir leur position dans cette société. C’est une absurdité totale. Si tu veux changer le monde, il faut que tu commences par accepter de changer ta vie. Quels hommes politiques sont prêts à courir ce risque ?

En lisant, le résumé de la pensée de quelques uns de nos intellectuels de gauche, de droite, comme du centre, je me dis toujours qu’ils se rattachent à ces familles par simple besoin de reconnaissance. Ils ne supportent pas la solitude. Les cajoleries de leurs parents flattent leur orgueil et donnent sens à leur vie, mais pas à leurs œuvres.

Je suis parfois moi-même tenté de les imiter. Il me serait si facile de rejoindre le Modem, ou plutôt Cap21. Mais je ne me laisse pas tenter par les sirènes car alors je ne serais plus libre. Je préfère m’isoler pour mieux défendre ce que j’ai à dire. J’espère tenir bon. Un jour les actions des isolés se rejoindront et feront oublier celles des anciennes églises.