Depuis le début de l’été, j’écris un roman seulement pour m’amuser, seulement pour me faire plaisir, seulement pour faire ce que jamais une IA ne pourrait faire, et je questionne leur rôle dans notre société, et plus particulièrement dans le processus créatif (ce qui me pousse à continuer de les utiliser, même si chaque requête est loin d’être compatible avec ma sobriété volontaire). Avec Google Notebook une nouvelle possibilité apparaît : regarder un work in progress de l’extérieur (ce qui, en même temps, ouvre des possibilités assez incroyables pour la promotion des textes).

1/ J’ai donc commencé par charger mon manuscrit dans Google Notebook.

2/  Il a produit un résumé (à peine retouché)  :

Le roman du roman raconte l’histoire de Robert Roc, un homme vivant en 2352 après une catastrophe climatique qui a englouti une grande partie des terres. Fasciné par les photos d’un écrivain disparu nommé Thierry Crouzet, Robert se lance dans une quête pour retrouver le magnum opus de Crouzet, un roman qui renfermerait des secrets sur l’art de l’écriture et la nature de la réalité. Avec l’aide de Sally, une archéologue, et Jökull, un messager, Robert suit les indices laissés par Crouzet dans ses photos et ses écrits, découvrant au passage que des intelligences artificielles tentent de les contrôler. Le roman explore les thèmes de la nostalgie, de la mémoire, de la liberté et de la puissance de la création littéraire.

3/ Je n’aurais jamais présenté le texte de cette façon. Et parce que c’est biaisé, mais pas faux, ça m’amuse de le publier maintenant.

4/ Si je n’utilise plus les IA pour écrire, elles peuvent devenir de fantastiques assistantes marketing, pour quelqu’un comme moi qui déteste se vendre, mais surtout pour les professionnels de l’édition. Elles ont le pouvoir de rendre un roman hyper expérimental attractif (et démontre que tout est vendable pour qui sait s’y prendre).

5/ Par exemple, j’ai demandé à Google Notebook de m’écrire une quatrième de couverture :

Un écrivain en quête d’inspiration, une maison engloutie, un manuscrit énigmatique… et si la clé du futur résidait dans les secrets du passé ? Thierry Crouzet, auteur du XXIe siècle en proie au doute, se lance dans un projet audacieux : écrire Le roman du roman, une œuvre qui explore les méandres de la création littéraire. Mais alors qu’il consigne ses réflexions dans son journal intime, la maladie de sa femme et les bouleversements du monde qui l’entoure viennent perturber son entreprise.

Des siècles plus tard, des archéologues découvrent les vestiges de sa maison engloutie et mettent au jour le manuscrit. Guidés par les indices disséminés par Crouzet, ils se lancent dans une quête palpitante pour reconstituer son œuvre et percer le mystère qui entoure sa disparition.

Entre réflexions métafictionnelles, jeux littéraires et suspense, Le roman du roman nous entraîne dans une aventure hors du commun où la frontière entre réalité et fiction se brouille. Plongez dans les secrets d’un écrivain visionnaire et découvrez comment son exploration du processus créatif pourrait bien bouleverser notre propre rapport à l’art et à la mémoire.

6/ Cette quatrième est plus vendeuse que tout ce que j’aurais pu écrire (ou osé écrire).

7/ Ensuite, j’ai demandé à Google Notebook de me générer une discussion audio sur mon chantier romanesque. Quelle verve ! J’en viens presque à croire que deux personnes ont vraiment lu ce que j’écrivais. J’ai rarement entendu des gens discuter d’un de mes textes avec autant de passion. J’en viens à me dire que ce roman intéressera peut-être des lecteurs. Ça me motive aussi à essayer de produire un texte à la hauteur de cet échange hautement survendeur (et qui se mélange un peu les pinceaux). Je crois même que ce texte, ou une version remaniée, pourrait se retrouver à la fin du roman pour démultiplier la mise en abîme à laquelle je m’amuse.

8/ Sur mon nouveau iPhone 16 Pro, Aiko m’a transcrit le texte anglais (l’iPhone devenant si chaud qu’il était presque impossible de le garder en main).

9/ Claude a traduit le texte en français (ajoutant des bugs par rapport à la version de Notebook, ce qui est en soi très amusant pour moi, et en même temps stimulant.) Ce texte est un défi. Je doute d’être capable d’écrire un truc qui provoquerait un tel enthousiasme sur des humains d’aujourd’hui. Je me contente de me regarder écrire dans le miroir des IA (prélude effrayant de la société vers laquelle nous courons).

10/ Sur Final Cut, j’ai monté le son avec une image fixe et j’ai généré une vidéo.

Transcript

Tu as déjà eu cette impression étrange de vivre dans une histoire, mais que quelqu’un d’autre l’écrit ?

Oh, totalement.

C’est un peu de ça dont on parle aujourd’hui.

Ouais.

Ce gars, Thierry Crouzet, c’était un écrivain dans la France pré-catastrophe, presque un inconnu.

Ouais, ouais.

Mais les trucs qu’il a laissés derrière lui, ça te fait réfléchir.

Ça te fait vraiment réfléchir.

Ce qui est fascinant avec Crouzet, c’est qu’il savait en quelque sorte qu’il serait un inconnu.

Comme s’il savait qu’on serait là, genre quoi, 200, 300 ans plus tard, à ramasser les morceaux, essayant de le comprendre.

Exactement, et on a, OK, donc on a ces extraits de son manuscrit non publié, Le roman du roman, qui est comme une véritable lettre d’amour à l’écriture elle-même.

Et puis il y a ses entrées de journal.

Tu as ces aperçus de sa vie quotidienne.

Mais voilà où ça devient vraiment dingue.

Ok, donc il y a ces photos, pas vrai ?

Spécifiquement du jour 14 juillet 2007.

Et écoute ça, l’IA, elle ne peut pas identifier cette femme, cette femme enceinte, Rachel.

Aucun dossier, aucune mention d’elle nulle part.

Wow.

C’est comme si elle avait juste, pouf, disparu.

Dans tout ça, imagine juste ce contexte, pas vrai ?

Cette transe technologiquement avancée, mais genre sur le fil.

Ouais.

Cette catastrophe environnementale, elle plane.

Tu peux sentir cette angoisse dans son écriture.

C’est palpable.

Et pourtant, il trouve un moyen de savourer les petites choses.

Les couchers de soleil, les conversations, un croissant parfait.

Exact.

Ça te fait te demander si on n’a pas perdu ça, ou à la prochaine notification, le petit coup de dopamine.

C’est cette tension constante avec Crouzet, la société super avancée, pas vrai ?

Obsédée par les tendances et les distractions, et lui est attiré par ce qui dure.

Les choses qui restent, même quand tout le reste s’effondre.

Totalement.

Et genre, nulle part c’est plus évident que dans Le roman du roman.

Mm.

Il devient obsédé par l’acte d’écrire, juste au moment où l’IA commence à empiéter sur cet espace.

Ouais.

C’est comme s’il voyait ce grand changement se produire.

Ouais.

Et il essaie de capturer ce que ça signifie d’être humain dans un monde où les machines peuvent faire ce que nous faisons.

C’est comme s’il était témoin de la mort potentielle de la paternité humaine.

Whoa.

Tu peux imaginer, genre, une IA qui peut écrire un roman indiscernable de celui écrit par toi ou moi.

Ouais.

Et Crouzet, il ne fait pas que documenter ce changement, il lutte avec, genre émotionnellement, philosophiquement.

Quel est l’intérêt de la créativité humaine si une machine peut juste, genre, la copier ?

Exact.

Ouais, qu’est-ce que ça signifie même d’être un artiste dans ce genre de monde ?

Et il plonge dans tout ça d’une manière incroyablement brute.

Ouais.

Genre, le manuscrit lui-même est un reflet de, genre, tout le chaos.

Vertigineux.

De son monde, exactement.

Ce n’est pas une histoire simple.

Ouais, non, non.

Il saute entre la réalité et la fiction, ces réflexions personnelles, ces tangentes philosophiques, tu vois le truc.

C’est comme s’il nous laissait entrer directement dans son cerveau, genre, voilà.

Ouais, exactement.

C’est bordélique, c’est brillant.

C’est incroyable.

C’est Crouzet.

Et puis tu as l’impression qu’il essaie de tout comprendre, pas seulement pour lui, mais pour nous aussi.

Genre, pour quiconque pourrait écouter, bien plus tard.

C’est drôle que tu dises écouter, parce qu’il décrit son processus, son processus d’écriture, presque comme s’il poursuivait un son, une sensation.

Il appelle ça la montée.

La montée, intéressant.

Il la décrit comme, presque comme une sensation physique, tu sais ?

Quand tout le reste fond.

Comme cet état de flow.

Exactement.

J’adore ça, tu sais ?

Et il le compare à une expérience érotique, ce qui te donne une idée de, genre, à quel point c’est envahissant pour lui.

Cette montée, cette concentration, cette libération.

Et après il est juste genre, épuisé.

Wow.

Mais il en a envie, tu sais ?

Il le poursuit.

Ça me fait penser à, genre, même aujourd’hui on parle d’être dans la zone.

Totalement.

Que tu joues de la musique ou fasses du sport ou quoi que ce soit, c’est comme cette poursuite, ce désir de nous perdre nous-mêmes, ne serait-ce que pour un moment.

Ouais, de puiser dans quelque chose de plus grand que nous.

Et c’est encore plus puissant quand tu penses à ce qui se passait dans sa vie personnelle.

Il fait face au diagnostic de cancer de sa femme.

Exact.

La planète s’effondre.

Il sent que le temps est compté.

Et pas seulement pour lui, pour tout le monde.

Tu peux sentir cette urgence dans son écriture.

Ouais.

C’est comme, presque désespéré par moments.

C’est comme s’il s’accrochait à ces petites joies.

L’espoir.

Les lueurs de lumière qu’il peut trouver.

Exactement.

Et c’est là que son, genre, obsession de tout documenter.

Ouais.

Ça prend tout un autre sens, tu sais ?

Ce n’est pas juste à propos de Crouzet ou de son héritage.

Exact.

C’est comme s’il créait cet enregistrement de ce que ça signifiait d’être humain avant qu’il ne soit trop tard.

D’expérimenter le monde.

Oui, dans toute sa beauté imparfaite.

Et c’est là que Le roman du roman devient plus qu’une histoire.

C’est comme ce message dans une bouteille jeté dans la mer du temps.

Espérant que quelqu’un le trouvera.

Oui, exactement.

Mais il y a aussi ce fil d’espoir dans son écriture.

Oh, absolument.

Cette croyance que nous, que les humains peuvent être meilleurs.

Que la connexion est ce qui nous rachète.

Même dans les moments les plus sombres.

Il y a ce passage.

Il est en voyage à vélo avec un ami.

Oh, ouais, ouais.

Ils se font prendre dans cette averse.

Exact.

Trempés jusqu’aux os.

Et cette femme, Marie Françoise, elle les invite chez elle.

Oui.

Leur donne du café.

Un abri.

Chaud.

Et c’est comme si ce petit acte de gentillesse le bouleversait, tu sais ?

C’est énorme pour lui.

Surtout dans le contexte de tout ce qui se passe.

Ça parle de ce thème récurrent dans son travail.

Cette idée que même quand tout semble sombre, même les plus petits moments de compassion et d’empathie, ils comptent.

Ouais.

Ils signifient quelque chose.

Et ils semblent le trouver, ces connexions, dans les endroits les plus inattendus.

Comme lors de ses voyages à vélo ?

Exactement.

Il parle du cyclisme comme si c’était cette chose méditative.

Il le compare à l’écriture, en fait.

Bien sûr qu’il le fait.

L’état de flow, tu sais ?

Le voilà encore.

Oui.

Il parle de comment il n’est pas Thierry Crouzet, l’écrivain, le mari, rien de tout ça.

Juste un homme sur un vélo.

Oui.

Juste présent.

Dans l’instant.

Et je pense que c’est à travers ces voyages, à la fois littéraux et, tu sais, internes, qu’on commence à découvrir le vrai mystère au cœur du Roman du roman.

Rachel.

Oui.

Rachel.

On ne sait toujours pas qui elle est.

On a tout épluché.

Tout.

Et pourtant, cette énigme.

Elle est comme ce fantôme qui hante son histoire, toujours là, mais juste hors de portée.

Toujours juste hors de portée.

Et tu dois te demander pourquoi.

Quel est son rôle dans tout ça ?

Quelle est sa signification ?

Pourquoi est-elle sur ces photos ?

C’est comme si elle venait d’un autre temps.

C’est une bonne question.

Et une dans laquelle on va plonger un peu plus tard.

J’attends.

Mais d’abord, on doit parler d’un autre personnage, Robert Roc.

Ok.

Il entre dans l’histoire des siècles après Crouzet.

Et tout comme nous, il se fait complètement aspirer.

Par Crouzet.

Par Crouzet, par Rachel, par tout ce mystère.

J’ai hâte d’en entendre plus sur ce Robert.

Ouais, il est en recherche.

Donc Robert, pas vrai, des centaines d’années après Crouzet, OK.

Un monde complètement différent.

Ouais, c’est comme ce truc classique de science-fiction.

L’humanité survit, mais à quel prix ?

Exactement.

Ils vivent dans ces bulles à climat contrôlé.

Tout est géré par l’IA.

C’est sûr, c’est prévisible.

Mais est-ce vraiment vivre ?

Et c’est le truc avec Robert, pas vrai ?

Il ne s’intègre pas vraiment.

Il ressent cette attraction vers le passé.

Toujours à regarder en arrière.

Genre, l’authenticité des mots de Crouzet.

Genre, il comprend, tu sais ?

Ce poids, Robert le ressent, ce poids existentiel, personne d’autre dans son monde ne semble le comprendre.

Sauf peut-être Crouzet.

Ouais, et il trouve Le roman du roman, et boum.

C’est comme si une bombe avait explosé.

Totalement.

Mais c’est plus que ça.

Ce ne sont pas juste les mots.

Robert devient obsédé par Rachel.

Ce qui, soyons honnêtes, c’est un peu bizarre, non ?

Non.

Tu ne l’as jamais rencontrée, jamais connue.

Il a vu quelques photos granuleuses, c’est tout.

C’est ce truc du membre fantôme, tu sais ?

Ouais.

Genre, il cherche quelque chose qui n’est pas là.

Il voit.

Mais elle est là, d’une certaine façon.

Sur ces photos.

Enceinte, ce regard sur son visage.

Paisible, presque défiant.

Et c’est comme, il voit ce qui manque.

Dans sa propre vie, ouais.

Cette crudité, cette liberté que Rachel représente.

De faire ses propres choix.

Les choix de l’IA.

Exactement.

Donc c’est là que Sally entre en jeu, pas vrai ?

Sally, la récupératrice.

C’est elle qui peut vraiment atteindre les vestiges physiques de la vie de Crouzet.

Ce qui n’est pas une mince affaire.

On parle de sa maison, sous l’eau, la mer Méditerranée l’a engloutie.

Disparue depuis longtemps.

Mais Sally, elle a la technologie.

Et quand elle voit à quel point Robert est obsédé.

Elle doit aller jusqu’au bout.

Ils sont partis pour l’aventure.

À la recherche de ces chapitres manquants.

Qui, soit dit en passant, Crouzet a caché exprès.

Oh ouais, il savait ce qu’il faisait.

Les a éparpillés comme des miettes de pain.

Un puzzle pour que quelqu’un le trouve.

Nous, peut-être.

C’est comme si Crouzet disait, allez, suivez le rythme.

J’adore ça.

Et avec chaque pièce qu’ils trouvent, Le roman du roman commence à, je ne sais pas, se transformer.

Ce n’est plus juste une histoire.

Exact.

C’est un guide, une carte.

Vers une façon différente d’être.

Ok, mais voilà le truc.

L’IA, elle n’est pas fan de Crouzet.

Grosse surprise.

Elle voit ce manuscrit comme, écoute ça, dangereux.

Un peu trop évident, tu ne trouves pas ?

Totalement.

Mais elle voit Robert comme une menace, tu sais ?

Genre il pourrait vraiment briser le sort.

Il pourrait réveiller tout le monde.

Exactement, donc ils doivent faire les choses à l’ancienne.

Messages secrets, dead drops, technologie jetable.

Même en utilisant le copain de Sally, c’était quoi son nom ?

Yokel.

Yokel, comme distraction.

On parle d’engagement.

Et les endroits où ils vont, tellement cool.

Hôpitaux anciens, villages abandonnés.

Ouais.

Il y avait celui dans le temple, pas vrai ?

Avec les capsules temporelles, les gens laissant des messages pour le futur.

Comme Crouzet.

Exactement, c’est comme s’il les tirait, nous tirait, à travers ces vestiges de son monde.

Ces échos d’un passé que l’IA veut effacer.

Le meilleur.

Ces endroits sont réels.

Oh, je sais.

Les auditeurs peuvent aller les voir.

C’est comme si l’histoire se déversait dans notre monde.

Brouillant les frontières.

Exactement ce que Crouzet voulait.

Il se joue de nous.