Voici une initiative intéressante : un nouveau modèle pour la société du vingt-et-unième siècle, qui va dans le sens des thèmes développés dans Le peuple des connecteurs. Je suis en gros d’accord sur le constat : la nécessité de créer une nouvelle forme d’organisation sociale, mais les analyses me paraissent parfois un peu démodées.

Par exemple, la volonté de trouver à tout prix une rupture de paradigme qui se serait située entre 2000 et 2002 (volonté de classifier, donc penchant pour une sorte d’essentialisme, ce qui nous amène vers la transcendance et des concepts que je n’aime pas trop).

Je n’ai rien vu de spécial durant ces années, rien de plus en tout cas qu’en 1999 ou qu’en 2003. Le graphique publié sur ConstellationW rassemble des faits fondamentaux mais il ne démontre pas l’existence d’une rupture. Je crois qu’il prouve que nous sommes tout simplement sur une courbe d’accélération exponentielle, que tout change de plus en plus vite, mais que la rupture, si elle doit se produire, n’est pas encore advenue. L’important, c’est la vitesse de changement, la nécessité de les prendre en compte.

Quant aux quatre raisons qui justifient une nouvelle société, je suis aussi en accord mais je les présenterais autrement :

1/ Je ne crois pas que cent consortiums mènent le jeu économique. L’économie est auto-organisée : tous les acteurs petits ou grands contribuent à sa dynamique. Oui, nous pouvons nous aussi nous auto-organiser en réseau, chacun de nous pouvant jouer un rôle clé dans ce réseau.

2/ La classe politique ne gère plus le long-terme mais elle ne gère plus aussi le court-terme. La complexité de la société est elle qu’il est impossible de la réguler globalement. Les actions doivent partir du niveau local et se généraliser d’elles-mêmes par émergence.

3/ Nos inquiétudes sont sans doute provoquées par la vitesse des changements. Nous ne savons plus de quoi demain sera fait, ce qui peut paraître effrayant mais aussi excitant. Pourquoi dire que nous avons besoin d’un forum de discussion ? Nous l’avons déjà. C’est internet.

4/ Je crois aussi que la spécialisation est un mal et que nous avons désespérément besoin de généralistes qui tentent de relier des domaines éloignés pour dégager de nouvelles idées. À partir des nouveaux compris mis à jour ces dernières années, nous devons remettre à plat le modèle de notre société.

Quant à la plateforme ConstellationW elle-même, dont j’ai mal compris le principe, je dois l’avouer, j’en vois mal l’intérêt. Pour que tous les gens qui pensent la nouvelle société, et qui veulent en discuter, puissent se regrouper, il suffit de consolider les flux RSS de leurs blogs. Inutile de développer une interface particulière qui apparaît comme une tentative de centralisation, sinon de récupération. Je crois que la plateforme de discussion doit être ouverte comme devra être ouverte la société de l’avenir.

Il est indispensable que chacun garde son indépendance, sa totale liberté pour qu’émerge une pensée collective. Mon blog est à moi, ce que j’écris est à moi, mais une partie de ce que j’écris peut participer à quelque chose de plus grand.