Une des principales caractéristiques du connecteur : il privilégie ce qui vient du réseau par rapport à ce qui vient des systèmes pyramidaux. Par exemple, il accorde plus d’importance à ce qu’il lit sur internet, dans les blogs notamment, qu’à ce qu’il lit dans la presse (système centralisé).

Bien sûr personne n’est encore totalement connecteur, personne ne s’est libéré à 100 % des structures hiérarchiques centralisées mais nous pouvons voir dans la vie courante une montée en puissance de l’attitude connecteur.

  1. Être connecteur n’implique pas disposer d’un accès internet. L’accès au réseau facilite nos interconnexions de point à point. En 2006, 45 % des Français se connectent au moins une fois par mois contre 20 % en 2001 (source Médiamétrie reprise par le Journal du Net). Une fois connecté, on ne peut plus tout à fait voir le monde comme avant puisqu’on le découvre soudain par une infinité de points de vue.
  2. Autre outil de connexion, le mobile : 80 % de taux de pénétration. Impossible de faire mieux à moins de brancher les nouveau-nés. On se connecte avec ses amis, mais aussi de plus en plus à des services de chat, de rencontre, de jeu… Encore une fois, la transversalité est en train d’être privilégiée.
  3. Multiplication exponentielle des hotspots. On tend vers une connexion continue. Les opérateurs téléphoniques, mastodontes centralisés, perdront peu à peu leur monopole. Chacun peut dorénavant ouvrir sa connexion aux autres.
  4. Les jeunes ne pensent qu’à se connecter, via SMS et MSN Messenger notamment. Ils maintiennent continûment le lien, font vivre le réseau, lui insufflent de la dynamique.
  5. Les jeunes, toujours eux, et c’est normal, multiplient les interventions dans leurs blogs. Ils participent à la pensée collective, partagent des expériences locales à l’échelle globale.
  6. Augmentation du nombre de télétravailleurs et de travailleurs indépendants. Cette augmentation est lente mais certaine. Un télétravailleur est presque assurément un connecteur dans l’âme.
  7. Multiplication des services de social networking et surtout des utilisateurs de ces services.
  8. Tous ces moyens de connexion entraînent une diminution du nombre de degrés de séparation entre les gens (voir la préface du peuple des connecteurs ). Je crois que nous rencontrons, par hasard ou non, de plus en plus souvent des gens qui connaissent nos amis. En tous cas, c’est mon cas.
  9. Cette densification des réseaux sociaux est illustrée par les manifestations du premier mai dernier, auto-organisées par les latinos aux États-Unis. C’est Lorenzo qui m’a soufflé cette actu publiée par Pisani. Plus besoin de chef, de leader charismatique, de parti…
  10. Dans les sociétés, la densification des réseaux sociaux se traduit par un court-circuitage des hiérarchies. Plutôt que de demander une info à son chef, on préfère la demander à celui qui d’après nous maîtrise le mieux cette info, même si cette personne travaille dans une autre équipe, voire dans une autre société.
  11. Je vois encore un signe, plus mystique, à la montée en puissance de l’attitude connecteur. Toutes les informations qui circulent entre nous, peu importe leur nature, constituent un flux, un peu comme celui des signaux électriques et chimiques dans nos cerveaux. C’est un pas vers l’intelligence globale, vers la conscience globale. Je crois que nous sommes les uns et les autres plus conscients de la totalité de la planète que par le passé. Nous nous sentons concernés par ce qui se passe ailleurs. C’est aussi cela être un connecteur.

PS1 : Dans le cadre du travail, on établit de nombreuses connexions. Quand quelqu’un me dit qu’il n’a pas de travail, je lui dis toujours prend n’importe quoi, tu rencontreras des gens, ces gens transformeront ton travail, tu te fabriqueras le travail qui te va. Mais le travail n’est pas plus source de connexions qu’une autre activité sociale. J’ai rencontré la plupart de mes amis grâce au jeu de rôle. N’importe quelle autre passion aurait produit le même effet.

Un pauvre n’est pas moins connecté qu’un riche. Leurs connexions diffèrent, c’est sûr, mais pas nécessairement en quantité ou en qualité. Je vis dans une station thermale. Tous les jours je passe devant un boulodrome où jouent les gens du village et les touristes. Je ne sais pas si ces joueurs sont pauvres ou riches, je sais en revanche qu’ils nouent sans cesse de nouvelles connexions.

Je suis de plus en plus convaincu que se connecter rend heureux. C’est une attitude qui peut changer notre vie, qui change la mienne en tout cas. On a de plus en plus l’impression d’appartenir à un tout. C’est ça qui est important. Par le passé, seuls les croyants avaient cette impression.

PS2 : Les réseaux doivent s’interpénétrer sinon nous n’arriverons jamais à la fameuse intelligence collective. Le jeu de rôle a été un de mes réseaux, le journalisme aussi, l’informatique un autre, les voyages, la littérature, le foot… Tout cela s’interpénètre sans réelle frontière.