Hier soir lors du JT un reportage sur les blogs a été diffusé, dans lequel je devais apparaître mais où les images ont été coupées pour des raisons techniques. Ça m’arrange en fait. 1/ Mon livre n’est pas sorti et il est trop tôt pour en faire la pub. 2/ Le cinquième pouvoir ce n’est pas les blogs. Je sens que je vais devoir le répéter souvent.

En tout cas, j’ai apprécié de discuter avec la journaliste Cécile Laronce de France 3. Elle m’a posé quelques questions et voici mes réponses.

— À votre avis quel est le candidat qui se débrouille le mieux avec internet et les blogs ?

— J’ai envie de répondre le cinquième pouvoir, tous ceux qui ne sont pas rangés dans une case mais qui font tout de même de la politique, au sens le plus noble car ils ne cherchent pas nécessairement à être élus à quoi que ce soit. Ils sont très présents sur internet, très souvent mieux placés que nos politiciens connus. Mais pour parler plus particulièrement d’eux, c’est à ce jour Ségolène Royal qui a le mieux tiré son épingle du jeu.

— En quoi internet (et les blogs) a changé le destin politique de Ségolène Royal ?

— Grâce à son site Désirs d’avenir, elle a réussi à emporter haut la main les primaires socialistes. Elle dit d’ailleurs qu’elle fera 50 % sa campagne présidentielle sur internet. Sans internet, elle ne serait même pas candidate aujourd’hui.

Début 2006, on commence à parler d’elle mais tout le monde est encore persuadé que les mammouths du parti réussiront à la faire tomber.

Plutôt que de séduire d’abord les cadres du parti, puis les militants, elle fait le contraire. Avec son site, elle donne aux Français la parole, ils la prennent, ils créent d’ailleurs des dizaines d’autres sites Désirs d’avenir dans les régions, chacun de ces sites menant des campagnes locales et indépendantes.

Ségolène Royal a ainsi réussi à décentraliser sa campagne et à démultiplier sa force de frappe, ce qui était indispensable vu qu’elle n’avait pas l’appareil socialiste à son service exclusif.

— Quelle est l’originalité du blog de Ségolène Royal et des autres blogs de la ségosphère ?

— Ce n’est pas un blog, c’est un site et il n’est pas original. Si, un tout petit peu, en ce sens qu’il comprend une section où les militants peuvent soit disant participer à la rédaction du programme de Ségolène.

Pour moi, cette section très vendeuse est le de la poudre aux yeux. Ségolène a réussi à faire participer les militants à sa campagne, pour arracher les primaires, pour porter sa bonne parole, mais pas pour écrire un programme. Ségolène avait promis un livre collaboratif… nous l’attendons encore.

Dans le fond, Ségolène n’a pas un programme original. Juste une méthode un peu originale.

— Finalement à travers le prisme de la toile le candidat devient autre, plus proche de l’électeur…

— Il faut faire attention de ne pas prendre l’électeur pour un couillon car internet ce n’est plus la TV, tout le monde peut dire ce qu’il pense. Le cinquième pouvoir ne se laissera pas berner par des promesses participatives qui resteront des promesses.

Ailleurs dans le monde, des exemples concrets – en Corée du Sud ou aux États-Unis – nous ont montré qu’on pouvait faire de la politique autrement.

— Qu’est-ce que le cinquième pouvoir ?

— C’est justement l’ensemble des citoyens qui grâce aux nouvelles technologies ne sont plus réduits au silence. Ils peuvent s’exprimer, peser en politique, proposer de nouvelles politiques… surtout ils peuvent agir, notamment au niveau local.

— Peut-on s’attendre à des surprise grâce à internet pour les présidentielles ?

— Nicolas Sarkozy ne comprend pas internet. Ségolène Royal un peu plus mais elle ne joue pas le jeu à fond, elle reste trop socialiste, trop classique. Il y a de la place pour un outsider qui sera capable, lui aussi, de décentraliser sa campagne mais aussi de mettre en place une politique réellement participative. Depuis cinq ans, internet a pesé dans beaucoup d’élections, ce n’est qu’un début. Un Bayrou pourrait nous surprendre. C’est un internaute, il comprend ce qui se passe. Mais tout reste à faire de son côté.

— Qu’est ce qu’on pourrait encore améliorer en matière de blogs ?

— Si je le savais, je le ferai. Disons que je fais avec mon blog, ce qui me paraît bien. C’est ça internet. On ne se demande pas ce qu’on devrait faire, on le fait. C’est ça la nouvelle politique menée par le cinquième pouvoir.