Le cinquième pouvoir est sorti hier, et j’ai fait un passage éclair sur iTélé, LCI et Europe 1, lâchant pas plus d’une ou deux phrases, pas facile de faire comprendre qu’il se passe quelque chose de radicalement nouveau.

Aujourd’hui, je devrais avoir un peu plus de temps sur BFM, la semaine prochaine sur RFI et France Info. Mais je dois avouer que j’ai pris de mauvaises habitudes sur le web. Nous y disposons d’un espace illimité et nous ne sommes pas familier des petites phrases, en tout cas moi.

Pour gagner en efficacité, je viens d’écrire une interview imaginaire (je suis preneur de formulations plus concises et de questions pièges auxquelles j’essaierai de répondre ici).

— Thierry Crouzet, c’est quoi le cinquième pouvoir ?

— C’est vous, c’est moi, c’est tous les citoyens. Grâce à internet, nous changeons la politique.

— Par exemple ?

— En 2005, lors du référendum européen, les médias ont accordé beaucoup de place au oui, les politiciens étaient majoritairement pour le oui… et le non l’a emporté. Le débat s’est joué sur internet, entre tous les citoyens.

— Mais tout le monde n’a pas internet !

— Lors du référendum, les internautes récupéraient des arguments sur internet, ils les imprimaient, les distribuaient sur les places de marché, puis ils revenaient sur internet avec de nouveaux arguments. À la fin, les médias ont fini par leur donner la parole. Étienne Chouard, un prof anonyme, est devenu le héros du non. Toutes les radios, toutes les TV, tous les journaux ont parlé de lui. Internet était entré en politique, non seulement pour les internautes, mais pour tous les Français.

— Vous me parlez d’une élite de gens avertis.

— Mais non, j’ai écrit mon livre pour expliquer le phénomène, pour montrer qu’il ne faut pas en avoir peur. Je veux encourager les citoyens à devenir les acteurs de la vie politique. Non seulement lors des élections mais à chaque seconde de leur vie. C’est cela la démocratie participative. Avec les blogs notamment, nous avons inventé un outil pour agir.

— Agir comment ?

— La politique commence par de petits gestes, de petites actions locales, par quelques citoyens qui se rassemblent contre une injustice, contre une dérive du pouvoir en place ou qui proposent d’améliorer quelques détails de leur quotidien. Tous ces petits débats vont finir par inventer une nouvelle société. J’ai envie que de plus en plus de gens participent à sa construction. Nous devons tous en devenir les ouvriers. Ce monde ne se fera pas en délégant toutes les responsabilités aux élus. Leur rôle est de nous aider à réaliser nos réformes. Ils ne sont pas là pour nous imposer les leurs.

— Tout ça c’est beau, mais le pire circule sur internet, des informations fausses, des mensonges…

— C’est ce que certains journalistes disent parce que ça les arrange. Les internautes savent qu’ils se trompent. Internet démontre en ce moment que le quatrième pouvoir n’est pas toujours un contre-pouvoir. J’ai envie de dire qu’en France il ne l’a pas souvent été. Le premier journal français, créé en 1631, La Gazette de France, a été financé par Richelieu. C’est le pouvoir qui a créé notre presse. Parfois, certains journalistes ont tendance à piquer ce qui est trash sur internet, ce qui est minable, pour discréditer internet. Ils oublient les débats de fond, souvent animés par des experts. Ils les oublient parce que ces experts font le boulot que ces mêmes journalistes oublient de faire. Plutôt que de nier internet, de le réduire à son mauvais côté, les journalistes devraient collaborer avec lui. Certains le font, de plus en plus nombreux d’ailleurs. Après tout, eux aussi appartiennent au cinquième pouvoir.