Hier à Paris, le matin, l’après-midi et le soir à la république des blogs, j’ai discuté avec des militants de tous les horizons et, bien sûr, avec les jeunes Modem, en tous cas ceux qui ne m’en veulent pas de ma sortie de Seignosse.

Ils m’ont raconté leurs mésaventures et le simulacre de démocratie qui règne au cœur de leur parti. Fin novembre se tiendra un congrès qui posera les statuts du soi-disant mouvement démocrate. Il fondera ainsi sa constitution.

Si la démocratie est un maître mot, cette constitution devrait être discutée par tous, différentes versions devraient être en lice, un vote devrait choisir celle qui semble la plus pertinente.

Que nenni, hier matin les cadres du Modem réunis en huis-clos, presque secrètement, ont statué en catimini et pondu les règles qui leur conviennent. J’ai tout simplement proposé aux jeunes de faire un coup d’état.

Pour commencer, ils doivent écrire collaborativement des statuts et se débrouiller pour que les militants les votent lors du congrès. Gagner ce vote est facile car les 50 000 nouveaux membres du Modem ne sont pas sous l’emprise des vieux (c’est ainsi, grâce aux militants recrutés sur internet, que Ségolène Royal réussit à emporter les primaires du PS l’année dernière).

Les vieux auront alors le choix de se retirer ou de jouer le jeu démocratique. Si les jeunes Modem n’ont pas ce courage de l’action, j’avoue que je n’ai plus envie de discuter avec eux, car si eux n’imposent pas la démocratie personne ne le fera à leur place. S’ils s’assoient aujourd’hui sur leurs idéaux, demain, quand ils seront au pouvoir, ils n’auront plus d’idéal.

À quoi pourraient ressembler les statuts d’un parti moderne ? Je ne me suis jamais posé la question avant mais j’ai tout de suite pensé aux douze points qui régissent les alcooliques anonymes ou aux dix points qui présidèrent au développement du réseau Visa. Je suis sûr d’une chose : il ne faut pas plus d’une dizaine de points, chacun tenant en une ligne.

  1. Les statuts doivent être révisables à tout moment dès qu’un quorum est réuni.
  2. Le parti doit être ouvert. N’importe qui se sentant en accord avec les statuts peut se dire membre du parti sans ne rien demander à personne. Cette approche donne la possibilité d’un développement exponentiel.
  3. Les statuts doivent contenir en eux-mêmes les principes politiques que défend le parti. S’il se veut démocratique, la démocratie doit être partout présente.
  4. Il n’y a pas besoin d’ajouter aux statuts une charte des valeurs. Les statuts doivent contenir les valeurs. Par exemple, un parti qui veut se détourner des vieux clivages doit accepter des militants des autres partis sans leur demander de renoncer à leurs autres attachements.
  5. Un parti démocratique doit se protéger des abus de pouvoir en introduisant en son sein la séparation des pouvoirs. Les cadres du parti ne doivent pas être candidats à des postes électifs et encore moins élus.
  6. Le tirage au sort peut même être utilisé pour désigner les cadres et assurer leur constant renouvellement.
  7. Les statuts doivent ainsi imposer à l’intérieur du parti ce que le parti voudrait appliquer au reste de la société. Avant de vouloir changer le monde, il faut commencer par se changer soi-même.
  8. La transparence doit être généralisée. Dès qu’une réunion se déroule, on doit savoir qui y participe et quelles en sont les grandes lignes. Il faut être open source pour favoriser l’intelligence collective.
  9. Les quelques points définissant les statuts doivent être féconds. Chacun doit être dans un document attaché expliqué et commenté. Ces points doivent induire toutes les prises de décisions politiques. Les statuts doivent par exemple contenir en eux-mêmes l’idée d’interdépendance, idées qui elle-même contient l’écologie…
  10. Les points doivent être objectifs. Du type « Il faut un quorum de 50% pour réviser les statuts. » Dire « La liberté nous guide. » n’a aucun intérêt car chacun fera de cette phrase ce qu’il veut.

Si un parti respectait de tels principes, je serais moins mal à l’aise face à ses militants. Peut-être je cesserais alors de croire qu’ils sont inconsistants (je ne vais pas refaire le coup de la médiocrité).