C’est le titre du triller haletant d’Ayerdhal. Personne ne remarque l’héroïne alors qu’elle est extraordinairement belle. Elle a découvert comment devenir tout le monde même auprès des gens qui l’aiment.

J’ai souvent aspiré à cette transparence, à une espèce d’élégance qui m’aurait permis d’être invisible, c’est-à-dire naturellement à ma place quel que soit l’endroit où je me trouve. Cette aspiration n’est qu’un rêve car je suis trop brut, trop moi-même. Je ressemble plutôt à un éléphant dans un magasin de porcelaines.

Quand j’ai une idée, je ne prends aucune précaution, je l’expose. Après avoir publié ma vision pour ma commune, des gens m’on reproché cette transparence.

« Tu vas te faire voler tes idées ! »

Que je les rassure tout de suite. Mes idées ne sont pas mes idées. Les idées n’appartiennent à personne. Au mieux, nous pouvons nous féliciter d’avoir appliqué certaines idées. Avoir une idée ne demande aucun travail. Les mettre en œuvre c’est une autre histoire.

Alors si des gens s’inspirent des idées que j’expose j’en serai heureux. Je n’aspire à aucun pouvoir, je souhaite simplement que les choses aillent dans un sens « soutenable ».

Je ne peux pas d’un côté prôner la démocratie participative et de l’autre refuser que des gens inattendus y participent. La transparence est vitale. Il faut abattre son jeu pour que d’autres puissent abattre le leur et que toutes les cartes construisent ensemble un nouveau château. Peu m’importe de savoir qui en assurera l’intendance.

Bien sûr, certains essaient toujours de profiter de la transparence des uns pour avancer masqués le plus longtemps possible. Ça n’a aucune importance. Nous sommes entrés dans la wikinomics. Celui qui s’enferme et refuse le dialogue est aujourd’hui moins performant que celui qui se dévoile.

C’est contre intuitif mais c’est comme ça. Notre sens commun nous trompe souvent. Il n’est pas adapté à notre monde complexe. Nous croyons trop souvent pouvoir nous en sortir seul alors que c’est impossible. Nous n’avons pas d’autres choix que collaborer si nous voulons nous installer dans le succès et la durabilité.

Dans un monde où l’innovation prime, même au niveau local, la transparence accélère les interactions. Elle aide à trouver des solutions. De plus en plus, les entreprises de pointe ouvrent leurs centres de recherche. Elles n’ont pas d’autres choix car elles ne peuvent se payer suffisamment de ressources pour développer leurs projets.

Sans transparence, il ne peut y avoir de démocratie participative. Les stratégies de secret sont l’apanage des systèmes totalitaires. Je connais trop bien mes propres tendances totalitaires pour ne pas chercher à m’en protéger à tout prix.

D’autres critiques surgissent alors. « En t’exposant, tu te feras éreinter, ta dignité en souffrira. » Dès qu’on prend la parole publiquement, on s’expose à toutes les calomnies. On s’expose aussi à rencontrer des gens qui partagent les mêmes idées et qui ont envie de faire ensemble un bout de chemin. Ces rencontres précieuses justifient tous les risques.

Depuis que j’ai publié Le peuple des connecteurs, je prends des coups, je riposte, je consolide mes idées. Lors de mes conférences ou débats, j’ai rencontré des politiciens, des intellectuels, des militants… Les échanges ont toujours été fructueux même quand ils ont été difficiles.

Les attaques ad hominem, les menaces voilées, sont les pires. Il suffit d’une recherche google pour en trouver à mon sujet de succulentes, sur Agoravox par exemple. Avec le temps, j’ai appris à passer outre. C’est un risque à courir dès que nous commençons à bousculer les idées reçues et les vieilles habitudes.