Entre vos commentaires et quelques brefs mails échangés avec Nassim Nicolas Taleb après la publication de mon billet sur le GIEC, j’ai peut être réussi à clarifier ma position.

Point de départ

  1. L’avenir est imprévisible.
  2. Le GIEC peut analyser justement la situation présente mais ne peut pas prévoir l’avenir.
  3. Les gouvernements se servent des prévisions, celles du GIEC entre autres, pour nous asservir.
  4. En conséquence, agissons par nous-même, au niveau local, pour empêcher d’aggraver la situation. Construisons l’avenir dont nous rêvons plutôt que d’éviter l’avenir catastrophique qu’on nous prédit.

Taleb est un empiriste comme je pense l’être. Il m’a écrit :

Je refuse de croire que nous sommes devenus soudain très intelligents et lumineux quand on n’a jamais été bons dans le passé. Donc il faut nous protéger des erreurs « scientifiques ».

Je défends la même position. Nous n’avons jamais prévu quoi que ce soit de sérieux qui touche à l’ensemble des sociétés humaines. Et quand nous l’avons fait, comme avec le bug de l’an 2000, nous nous sommes plantés. Je ne vois aucune raison pour que le GIEC fasse mieux.

Maintenant nous pouvons persévérer dans l’empirisme. La biosphère réussit fort bien à maintenir son équilibre depuis des milliards d’années. Le mieux que nous ayons à faire est donc de nous faire discrets en réduisant notre empreinte écologique. Ne jouons pas aux apprentis sorciers. Taleb invoque un « super-precautionary principle » et un « super ecological conservatism ».

Il m’a aussi rappelé, ce qui est un comble puisque c’est mon fond de commerce, que les gouvernements ne contrôlaient pas grand-chose, donc que les prévisions sur lesquelles ils s’appuyaient, qu’elles soient fausses ou non, n’avaient pas beaucoup d’influence. En résumé, laissons les oracles s’amuser et pendant ce temps agissons.

Sans l’appeler ainsi, j’ai toujours milité pour un super-principe de précaution. Pour moi, toute action globale est dangereuse même quand elle est bien intentionnée. La précaution ultime, c’est interdire les actions globales, genre déploiement massif de l’énergie nucléaire, car leurs résultats sont imprévisibles et irréversibles.

Dans une vaste perspective de décentralisation, je suis en revanche pour libérer les initiatives individuelles, les prises de risques à très petites échelles qui, si elles ne sont pas plus prévisibles, ont plus de chances d’être réversibles. Dans tous les cas, il vaut mieux de petites erreurs que de grandes erreurs. Je crois que nous devons imiter l’évolution. En fonctionnant comme elle, en adoptant une approche biologique, nous avons une chance de maintenir un vieil équilibre dont la plupart des interactions nous échappent.

Point d’arrivée

  1. L’avenir reste imprévisible mais laissons les oracles jouer avec.
  2. Le GIEC nous révèle que nous saccageons le monde en ce moment même.
  3. Les gouvernements ne contrôlant rien, nous ne pouvons pas compter sur eux pour éviter les dérèglements climatiques.
  4. Les actions globales ayant des résultats imprévisibles et irréversibles, privilégions les actions locales.