Je commence par citer Naomi Klein :

Là où les gauchistes promettaient de libérer les salariés des patrons, les citoyens des dictateurs et les pays colonisés de la domination impériale, Friedman promettait la « liberté individuelle », projet qui élevait des citoyens atomisés au-dessus de toute entreprise collective et leur permettait d’affiner leur liberté absolue par leur choix de consommation.

Si on me traite parfois de gauchiste on me traite plus souvent d’ultralibéral, et cette citation m’éclaire sur ce paradoxe. Je ne suis pas un libéral au sens de l’école de Chicago de Friedman parce que je n’oublie pas que nous sommes interdépendants. Nous vivons dans un réseau de relations qui nous contraint.

Je crois à la liberté, je crois que de temps à autres nous pouvons nous arracher aux contraintes pour prendre de véritables décisions mais ces moments restent exceptionnels dans une vie. Et nos décisions s’inscrivent alors dans le jeu des interdépendances. Personne ne peut s’en dégager, personne ne peut s’élever au-dessus du collectif à moins de fuir la terre saturée aujourd’hui par nos présences.

Si les gauchistes ont tendance à négliger cette possibilité de la liberté, cette chance que nous avons de temps à autre de couper le fil des causes et des effets pour introduire dans le monde des nouveautés radicales, les libéraux ont tendance à négliger l’interdépendance qui nous lie les uns aux autres et nous rend responsables les uns des autres.

Parce que je crois à la liberté, je ne suis pas un gauchiste. Parce que je prends en compte l’interdépendance, je ne suis pas un libéral. Voilà pourquoi je me définis comme un connecteur : un homme libre d’établir de nouvelles connexions dans le vaste réseau de notre humanité.