Vous êtes en train de nous mentir encore une fois. Vous recommencez. Vous ne pouvez pas vous en empêcher. Longtemps vous nous avez assenés avec arrogance que le capitalisme et le libéralisme économique impliquaient la fin de l’histoire, c’est-à-dire la mise en œuvre du meilleur des systèmes possibles. Nous aurions atteint un idéal indépassable. Et puis patatras.

Ça commence en 2007 aux États-Unis avec la crise des subprimes, ça se propage au monde en 2008, ça se complique en 2009 et ça se poursuit. Vous n’avez rien vu venir, vous n’avez rien prévu mais vous continuez à nous donner des leçons. Le FMI (Fond Monétaire International), dont l’un des buts est de garantir la stabilité financière, qui n’a rien garantit du tout, joue encore celui qui maîtrise la situation.

— Nous ne recommandons pas le contrôle [des banques] par l’État, mais il peut y avoir des circonstances où c’est effectivement la manière la plus efficace de stabiliser des institutions, affirme Jan Brockmeijer, directeur adjoint de la division des marchés financiers du FMI .

Soyez sérieux, soyez sages, arrêtez de nous dire ce que nous devrions ou ne devrions pas faire. Surtout arrêtez de vous contredire dès que le vent tourne. De prôner l’extrême libéralisme puis l’étatisme. Vous vous êtes plantés, lamentablement, vous devriez avoir honte. N’importe qui ferait dans sa culotte à votre place. Vous, non, vous fanfaronnez et donnez des leçons. Mais vous n’êtes pas les seuls, vos collègues tout aussi aveuglés vous encouragent dans l’erreur. « L’OFCE prédit deux années noires en France, avec récession et chômage » peut on lire dans une dépêche de l’AFP datée du 21 avril 2009 .

L’OFCE, c’est l’Observatoire français des conjonctures économiques de Sciences Po. Encore une institution de grands manitous sensés tout savoir sur ce qui se passe et se passera. Ils n’ont pas prédit la crise mais s’autorisent à nous la décrire, à nous dire combien de temps elle durera et dans quel état de délabrement nous en sortirons. C’est tout simplement extraordinaire. Ces organismes plus ou moins officiels, plus ou moins autorisés, imitent Madame Soleil qui, même après avoir dérapé, nous assène ses prédictions, continue même à nous les facturer au plus haut prix.

— Je dis n’importe quoi mais, comme j’ai l’impression de vous rassurer, je vais vous en redonner.

La crise économique, par sa brutalité, démontre l’imposture des oracles. En fait, ce beau monde n’est capable de prévoir l’avenir que quand tout va bien. Moi aussi je peux dire que demain il fera jour. J’ai peu de chances de me tromper. En été, je peux dire qu’il fera chaud le lendemain. Déjà, je prends un risque. Mais je ne me hasarde pas à indiquer les prochains chiffres du Loto. Pourtant les économistes qui veillent à notre tranquillité font bien pire. Ils nous assènent ces numéros dans l’ordre pour tous les tirages de l’année.

Même quand tout va à peu près bien, ils se plantent encore. En France, la croissance 2008 du PIB devait s’élever à plus de 2 %, même à 2,5 % selon certains optimistes, on s’est contenté de 0,7 %. Certes la crise a tout faussé. Je rappelle qu’elle avait commencé en 2007 aux États-Unis et que, dans une économie globale, on pouvait s’attendre à un contre-choc. Non, nos penseurs sont plus malins, à se demander s’ils pensent ou s’ils communiquent les chiffres que nos chefaillons leurs ordonnent de communiquer.

C’est vrai. On peut se poser des questions. Pourquoi existe-t-il des gens pour nous proposer des chiffres qu’ils savent faux par avance ? Qu’est-ce qu’ils ont dans le pantalon ? On-t-ils une colonne vertébrale ? Que disent-t-ils à leurs enfants quand ils rentrent chez eux ?

— Aujourd’hui, j’ai menti mes chéris. Un gros mensonge qui m’a rapporté une bonne prime.

Je ne voudrais pas me trouver dans cette situation et devoir chercher des explications tordues pour me justifier chaque soir. Quand, en estimant le taux de croissance à avenir, on se trompe de 2000 à 2008 et qu’on ne tombe juste qu’en 2004, on ne peut plus dire qu’on s’est trompé . On peut avouer avec humilité son incompétence et changer de métier. Si on ne le fait pas, c’est qu’on est un petit rigolo qui aime jouer à la roulette avec nos impôts.

Tout ça pour dire qu’il faut arrêter d’écouter les experts qui nous prédisent tantôt monts et merveilles, tantôt calamités et récessions. Ils sont incapables de voir que l’économie de demain est déjà à l’œuvre. Alors ils cherchent à sauver l’économie du passé, une économie dépassée. Faut les comprendre, ils sont payés par cette ancienne économie. Rien ne les pousse à voir ailleur