Si j’avais vu plus tôt le graphique de Peter Kim et de son équipe, j’aurais peut-être expérimenté la déconnexion plus tôt.
Comme je le raconte dans J’ai débranché, je ne suis pas sûr que nos critères psychologiques actuels soient adaptés aux êtres réseaux que nous sommes en train de devenir, toutefois j’ai compris à mes dépens que le Net peut stresser et stériliser l’être pré-réseau qui subsiste en moi comme l’illustre le graphique.
Juste avant de le découvrir, j’avais lu un long article de Vanity Fair qui montre que par beaucoup d’aspects, les vingt dernières années n’ont pas été d’une créativité extraordinaire. Selon l’auteur, Kurt Andersen, les romans d’il y a 20 ans paraissent toujours d’actualité. Ce n’était soi-disant pas le cas tout au long du vingtième siècle. Les choses se démodaient plus vite.
J’avoue que j’ai une autre explication. Ces romans ne paraissent pas datés tout simplement parce que la créativité littéraire s’exerce dans d’autres champs, en ligne par exemple. Je ne pense donc pas que nous soyons moins créatifs à cause du Net, toutefois j’entrevois un danger que j’ai déjà relevé il y a quelques années.
Si nous exposons nos idées, nos théories, nos textes… au fur et à mesure que nous les produisons, nous ne leur laissons pas le temps de mûrir et de se consolider. Trop vite lâchés dans l’écosystème numérique, nos contenus s’y désintègrent souvent. Dans le domaine biologique, les mutations doivent s’ancrer dans les zones géographiques restreintes avant de rejoindre l’écosystème global. Les innovations radicales ont sans doute besoin d’un peu de secret avant d’être diffusées, alors seulement la communauté peut leur donner un coup de boost salutaire.