J’en ai assez de ces textes écrits pour divertir, de ces histoires de flic ou de vaurien écrites par des auteurs qui n’ont rien de flic ou de vaurien. Ils croient leur imagination toute puissante et elle les trahit à chaque ligne. Leur méchanceté est feinte, leur psychologie débile, leur intrigue digne de Disneyland.
Dans ce paysage sinistré, Lilian Bathelot nous a concocté une giclée de ferraille virtuose. Une œuvre de tireur délite, d’amoureux des armes et des femmes. C’est bref, de cette longueur attachée au temps d’aujourd’hui, c’est intense et fracassant. Le diamétral opposé de cette mode intensifiée par Millénium, de cette tentation du non-style alangui dans des descriptions infiniment lassantes. Lilian, lui, me cloue en deux phrases et me placarde contre les vitres de son huis clos, tout en me projetant dans une temporalité dédoublée, celle d’un train, celle d’une époque idéale et révolue. Le résultat est musical et limpide.
J’avais tout de suite remarqué qu’elle était possible, et je m’étais installé sur un des quatre sièges qui lui faisaient face, sur sa gauche.
Si on ne peut plus rencontrer une fille et simplement jouer un peu ensemble sans penser à rien d’autre, alors c’est plus la peine.
Il y a de l’Étranger de Camus dans ce Bathelot virevoltant. Dans le style, le ton, le monologue, la perspective et aussi la lumière, oui paradoxalement malgré le registre noir, de grandes coulées chaudes ne cessent de remonter du Midi en un concentré de vie, un cycle complet qui m’a fait penser à cette théorie selon laquelle le fœtus parcourt, au cours de sa croissance, toute l’évolution.
Terminus mon Ange, c’est un livre pour vous donner à vivre, pas pour vous faire oublier votre vie, mais pour vous donner envie d’y plonger avec délectation. C’est un livre qui vous invite à vous lever et à marcher. C’est un livre.
Sortie 21 mars 2014...